Notre obsession absurde pour Israël est mise à nu
Pour beaucoup, le Moyen-Orient signifiait seulement, Israël. Maintenant, la vie de millions d’Arabes a été portée à l’attention de l’Europe.
Adaptation française : Hanna
La révolution arabe expédie les contenus d’articles, des livres et des discours sur le Moyen-Orient à la poubelle de l’histoire. Dans quelques mois, les lecteurs pourront aller dans les bibliothèques ou les archives de journaux et se demanderont comment plusieurs se revendiquant comme experts ont fermé les yeux sur la tyrannie et ses conséquences.
Pour une génération de militants politiquement actifs, sinon moralement cohérents, le Moyen-Orient a signifié Israël et seulement Israël. En théorie, ils auraient dû être en mesure de s'en tenir à des principes universels et au soutien d ‘un règlement juste pour les Palestiniens tout en s'opposant aux dictatures qui ont maintenu des Arabes sous leurs jougs. Peu, cependant, ont été en mesure de s'opposer à l'oppression sous toutes ses formes de façon cohérente. La droite n'a pas été meilleure que la gauche libérale dans ses obsessions à l’encontre des Juifs. La brève lecture des journaux conservateurs montre que, à tout moment de leur première préoccupation concernant les changements politiques au Moyen-Orient il était important de savoir comment cela affectait Israël. Pour les deux camps, la vie de centaines de millions d'Arabes, de Berbères et de Kurdes qui n'ont pas été impliqués dans le conflit pourrait être oubliée.
Si vous en doutez, méditez sur les histoires que les chefs d’agence du Moyen-Orient ont négligées jusqu’à ce que les révolutions qui n’ont aucun rapport avec la Palestine, les aient forcés à en prendre connaissance.
Ø Kadhafi était tellement effrayé par un tour de force, qu’il avait entretenu l’armée libyenne petite et mal équipée et avait recruté des mercenaires et des paramilitaires, « forces spéciales », avec lesquels il pouvait compter pour abattre la population civile en cas de besoin.
Leila Ben Ali, épouse du président tunisien, était une figure grotesque, extravagante, mais qui pria tous les correspondants étrangers à écrire au sujet de ses aspirations avides pour la richesse. Ce n'est que lorsque les Tunisiens se révoltèrent que les journalistes se sont agités pour dire à leurs lecteurs comment elle avait poussé la population à la révolte en combinant les traits les moins attrayant de Imelda Marcos et de Marie-Antoinette.
Ø Encourageant, ceux d’entre nous qui gardent la nostalgie de la meilleure tradition de la vieille gauche, la Tunisie et l’Egypte avaient des syndicalistes indépendants, qui pourraient jouer « un rôle de premier plan », comme nous avions l‘habitude de dire, dans l’organisation et l’exécution des soulèvements.
Loin d'être une cause de la révolution, l'antagonisme à Israël a partout servi les intérêts des oppresseurs. Les Européens n'ont pas le droit d'être surpris. De tous les peuples, nous devons savoir à partir de notre expérience du nazisme que l'antisémitisme est une théorie du complot du pouvoir, plutôt que de la haine raciste classique de pauvres immigrants. Les régimes fascistes sont arrivés à cela quand ils ont cherché à nier la propre liberté de leurs peuples. Les Protocoles des Sages de Sion, la falsification de l'extrême droite du régime tsariste en décomposition émise en 1903 pour convaincre les Russes qu'ils devraient continuer à obéir à chaque ordre du tsar, dénoncent les droits de l'homme et la démocratie comme étant des façades derrière lesquelles les dirigeants juifs du monde manipulent secrètement les païens crédules.
Les Baasistes syriens, le Hamas, la monarchie saoudienne et Kadhafi ont promu les protocoles, pour les élites, pourquoi ne pas saluer de tels perfides fantasmes permettant de rejeter la démocratie en tant que fraude et pouvant justifier leur domination ? Juste avant la révolte libyenne, Kadhafi a tenté désespérément d’attendrir la vieille Europe. Il a essayé de détourner la colère libyenne en appelant à une révolution populaire palestinienne contre Israël. Cela peut ou ne pas avoir été justifié, mais il aurait certainement rien fait pour aider les Libyens misérables.
Dans son épitaphe sur un tyran, Auden a écrit :
« Quand il riait, de respectables sénateurs éclataient de rire
Quand il implorait, les petits enfants mourraient dans les rues »
L’amnésie de l'Europe sur la façon dont la tyrannie est exploitée dans notre continent, explique pourquoi la révolution libyenne est embarrassante pour une riche collection de dupes et de fripouilles qui étaient disposés à rire avec Kadhafi. Ses contacts en Grande-Bretagne étaient autrefois confinés aux extrémistes. Il a fourni des armes à l'IRA, a financé le Parti révolutionnaire des travailleurs, la désagréable secte trotskyste de Vanessa Redgrave, a diverti Nick Griffin et d'autres néo-nazis. Nous ne devrions pas les oublier quand viendra le temps de régler ses comptes. Mais quand Tony Blair, qui a été si éloquent en dénonçant les génocides de Saddam, a organisé une réconciliation avec Kadhafi après le 9 / 11, son amitié a ouvert la voie à l'administration britannique pour embrasser la dictature.
Ce n’était pas seulement BP et d’autres compagnies pétrolières, mais également des universitaires britanniques qui ont été heureux d’accepter ses largesses. La ‘ London School of Economics’ a reçu 1.5 millions de Livres sterling de Saif al-Islam Kadhafi, l’argent qui, par définition, doit avoir été volé au peuple libyen, malgré l’avertissement demandant à faire marche arrière du professeur Fred Halliday, dernier expert et très regretté, sur le Moyen-Orient de la LES, qui n’a jamais hésité à regarder les dictateurs dans les yeux.
«J'ai appris à connaître Saif comme quelqu'un qui regarde la démocratie, la société civile et les valeurs libérales profondes comme sa source d‘inspiration », ronronna David Held de la LSE, tout en acceptant le chèque. Une autre fois, Human Rights Watch, un adversaire fiable de la tyrannie, est allé plus loin et décrit une fondation que Saif a dirigée en Libye en tant que force pour la liberté, prêt à impliquer le ministère de l'Intérieur dans la lutte pour les libertés civiles. Entre-temps, et sans surprendre quiconque, Peter Mandelson, le papillon du Nouveau parti Travailliste, a voleté autour de Saif au cours de soirées à la maison de campagne de la ploutocratie.
La semaine dernière, Saif, le « libéral » défenseur des droits de l’homme et compagnon de dîner de Mandelson, est apparu à la télévision libyenne, disant que les hommes armés de son père se battraient jusqu’à la dernière balle pour sauvegarder la famille Kadhafi aux affaires, une promesse qu’il maintient. L’arrière pensée de ceux qui l’ont flatté, est que la seule question ayant de la valeur au Moyen-Orient consiste à adopter une attitude en ce qui concerne le conflit israélo-palestinien, et que l’oppression d’Arabes par les Arabes est une préoccupation mineure.
La longévité des régimes présidés par les familles Kadhafi, Assad et Moubarak et la Maison des Saoud devrait être une raison pour les dénoncer plus vigoureusement, mais leur apparente durabilité s’ajoute au sentiment que quelque Libyens, Syriens, Egyptiens et Saoudiens veulent vivre sous des dictatures.
L'Union européenne, qui a tant fait pour exporter la démocratie et la primauté du droit aux ex-dictatures communistes d'Europe de l‘Est, a joué un rôle misérable au Moyen-Orient. Elle verse des aides, mais ne demande jamais la démocratisation ou les restrictions des pouvoirs policiers en retour. Cela devra changer si la promesse du dernier mois doit être réalisée. Si c'est pour aider à la construction démocratique, l'Europe aura besoin de se rappeler autant que les bénéficiaires de l'argent que vous ne pouvez jamais construire des sociétés libres sur les théories du complot racistes des nazis et des Tsars. Ils sont et ont toujours été les airs que les tyrans chantent.
[Mardi 01/03/2011 19:21]